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Titre du blog : Saménerve
Auteur : Yannamar
Date de création : 14-06-2009
 
posté le 28-03-2014 à 08:19:49

POESIE.

Corneille s'est invité au château !
> Colportez, braves gens, ces beaux alexandrins.

 

Elle

Je vous cherchais, Seigneur, pour savoir de vous-même

Si je puis dire encore que le Président m'’aime

Ou si, pour mon malheur, il faut que je m'’inquiète

Du bruit qu'’on voit fleurir dans toutes les gazettes.

 

Lui

Ah ! Madame, il est vrai que la Cour toute entière

Bruit d'une étrange affaire et d'un homme en scooter

Qui, nuitamment dit-on, se rendrait en cachette

En des lieux clandestins courir une amourette

Et rencontrer là-bas une jeune personne

Trop sensible aux attraits qu'apporte la couronne.

Mais cet homme casqué, dont on ignore tout,

Ce n'est pas moi, Madame, il s'en faut de beaucoup.

 

Elle

Je voudrais bien pouvoir vous croire en cette affaire,

Mais ce n'est pas, Seigneur, ce qu'on lit dans Closer.

Vous quittez, paraît-il, notre palais royal,

Vous vous travestissez en souverain normal,

Vous hantez les marchés avec votre conquête.

Pour le dire en un mot, vous sautez la Gayette.

 

Lui

Madame, c'en est trop, je ne permettrai pas

Qu'on moque ainsi le trône et je vais de ce pas...…

 

Elle

Ah, cruel, il suffit. Je te comprends trop bien.

Du mariage toujours tu repoussais les liens.

Perfide, tu savais qu'en ne m'épousant pas

Tu pourrais profiter de plus jeunes appas.

Toujours insatisfait, errant de femme en femme,

Tu viens de me montrer la noirceur de ton âme.

Ingrat ! Te souviens-tu qu'avant de me connaître

Tu balançais toujours, tu ne savais pas être

Le prince que l'on craint. Que serais-tu sans moi ?

Je t'ai connu vassal, j'ai fait de toi un roi.

Tu me disais alors, comble de perfidie,

Avoir enfin trouvé la femme de ta vie !

Tu t'es lassé de moi comme de Ségolène,

Mais attention, François, je te le dis sans haine,

Il se pourrait qu'un jour, tes femmes réunies,

Ségolène avec moi, et peut-être Julie,

Dans un moment de blues ou bien de bravitude,

Étalant au grand jour toutes tes turpitudes,

Révèlent à la Cour et au monde ébaubi

Combien était trompeur le doux nom de Flamby,

Faisant ainsi savoir pour la première fois

Quel monstre se cachait sous la fraise des bois.

 

Lui

Ce n'est plus le François que vous avez connu

Qui vous parle, Madame, et vous tombez des nues

Quand une saltimbanque, assise à votre place,

Vous fait trop voir le triste effet du temps qui passe.

Vous voulez qu'on vous plaigne et ne supportez pas

Qu'une autre au lieu de vous accompagne mes pas.

Mais vous-même naguère, au temps de votre gloire,

Vous n'étiez pas toujours modeste en vos victoires

Et vous avez voulu, face à votre rivale,

M'embrassant devant tous, humilier la Royal.

Ce temps n'est plus, Madame, il vous faut oublier

Le faste des palais, les ors de l’Élysée.

J'ai décidé pour vous de notre vie commune.

Vous saurez, j'en suis sûr, ne pas être importune,

Rester à votre rang, complaire à votre Roi,

Troisième dans histoire à s'appeler François.

Vous avez partagé, pendant quelques années,

D'un prince corrézien la noble destinée.

Vous avez approché les rives du pouvoir ;

Il vous faut les quitter et vous devez savoir

Qu'en d'autres temps, Madame, il arrivait souvent

Aux femmes comme vous de vieillir au couvent.

 

Elle

Eh bien, Seigneur, adieu. Je vois que vos caprices

Pour se réaliser veulent mon sacrifice.

Je vous laisse la place et vais en d'autres lieux

Où j'espère trouver avec l'aide des Dieux

Quelqu'un qui mieux que vous aura su m'écouter,

Quelqu'un qui mieux que vous connaîtra l'art d'aimer,

Et qui pourra peut-être au fond de mon malheur

M'aider à préparer des lendemains meilleurs.

 

[François III sort. La duchesse reste seule.]

 

Tu crois avoir vaincu, tu te trompes, François ;

On ne méprise pas les femmes comme moi.

Tu te réjouis trop tôt d'un triomphe facile,

Ma feinte soumission n'était qu'un leurre habile

Et tu sauras bientôt ce que peut Valérie

Pour que le dernier mot ne soit pas à Julie.

 

Salutacionès.